Diouf ou le chaos

Depuis des années, Robert-Louis Dreyfus a pris l’habitude de tuer le bien et le mal dans un club qui, déjà soumis à une pression immense venue de l’extérieur, ne peut se permettre des dissensions en son sein. Mais jamais avare de mauvais choix et de bévues magistrales, le grand argentier suisse a toujours mis en […]

Depuis des années, Robert-Louis Dreyfus a pris l’habitude de tuer le bien et le mal dans un club qui, déjà soumis à une pression immense venue de l’extérieur, ne peut se permettre des dissensions en son sein. Mais jamais avare de mauvais choix et de bévues magistrales, le grand argentier suisse a toujours mis en face du décideur au quotidien du club l’un de ses portes-flingues, histoire de « contrôler » ce qui se passait dans son joujou. Résultat ? Plus de quinze ans sans titre et un Louis-Dreyfus devant la justice. Pour autant, l’homme n’apprend pas et réitère sans arrêt les mêmes erreurs. Pathétique. Petite réflexion sur les rouages d’une guerre digne de la cours de maternelle, voire de l’assemblée nationale, à la sauce RLD.

RLD, ce phénomène
Incapable de mettre de l’ordre dans son propre club, le milliardaire suisse se croit toujours de bon conseil. En début d’année, il a ainsi décidé de balancer sur la place publique un tas de critiques contre Pape Diouf et sa bande, qui auraient certainement dues rester dans l’intimité du club. Discréditer ses délégués est une vieille habitude, qu’il répète à intervalle constante depuis qu’il est à l’OM. Le club semblait pourtant dans une réelle dynamique de victoire, mais « rien ne lui fait peur », dixit Louis Acariès. Si l’incident n’a pas manqué de faire des jaloux, tant sont nombreux les lecteurs de L’Equipe qui envient les talents et le charisme de RLD, Eric Gerets s’est avoué pour sa part surpris et déçu. Pas étonnant ! Véritable marque de fabrique, les interventions de l’héritier Louis-Dreyfus n’amusent généralement que lui et les personnes de son entourage, les seules capables de saisir ses desseins. Malgré que l’homme ne prenne la parole qu’une fois ou deux par an, il faut généralement que chacun y mette du sien pour déceler le pourquoi du comment.

Incompréhension de courte durée
Pendant un court laps de temps, certains ont donc cru que cet épisode avait pour destinée de grossir la liste des mystères qui ont jalonné le règne du milliardaire à l’OM. Mais Pape Diouf a rapidement émis une hypothèse concordante, adoptée de tous : « il y a pour moi derrière cette histoire Vincent Labrune, afin de déstabiliser le président de l’OM pour des desseins non avoués. Cette manière de procéder ne ressemble pas à Robert. » L’ancien agent de joueur a en tout cas compris qu’il était dans la ligne de mire de quelques arrivistes sans foi ni loi, et que le moindre faux pas lui serait fatal. En conséquence, il décide de ne pas prolonger Eric Gerets dans l’immédiat comme c’était prévu, histoire qu’on ne le lui reproche pas en cas d’échec. La nouvelle a de son côté rapidement fait le tour de la ville. Pour faire plaisir à Robert, certains ont d’ailleurs mimé l’expression qu’il attendait : « des conspirateurs au sein même du club ? Ca fait si longtemps ! » L’actionnaire semble toujours se réjouir de voir pétiller les yeux des gens quand il leur fait la surprise de bousiller leur passion.

Un « conglomérat » de Parisiens
C’est donc dans la capitale que tout se joue. Marseille n’étant vraisemblablement pas assez prêt du domicile de quelques-uns des membres du conseil de surveillance, voire du coeur de certains autres. Pour autant, Pape Diouf nous a appris la semaine passée que neuf des douze membres du conseil habitent Marseille. Petit aperçu de la logique RLD, lequel a d’ailleurs toujours eu le don pour s’entourer de personnes compétentes en matière de business, mais certainement pas dans le domaine de la géographie, de l’histoire ou du football. L’homme désigné par le président de l’OM est donc Vincent Labrune. Proche des légendes de TF1 Etienne Mougeotte, Patrick le Lay et Charles Villeneuve, il a été présenté à Dreyfus par Louis Acariès. Dès lors son dévouement et sa connaissance du football ont impressionné le propriétaire de l’OM qui l’a intégré peu à peu parmi ses proches. Le milliardaire a-t-il été séduit par la théorie du « temps de cerveau disponible », spécialité de la première chaîne de France, et souhaité l’appliquer aux supporters marseillais ? Ce ne serait pas étonnant, tant il semble à des années lumières de comprendre ce qui se passe dans leur tête. Président du conseil de surveillance phocéen, Labrune (il est reconnaissable à sa couleur de cheveux) a notamment pour mission de vérifier que Pape Diouf ne détourne pas des sous. Il faut se souvenir que RLD s’est déjà fait abusé dans ce domaine par des voyous qui étaient en réalité ses amis (et non l’inverse). Ayant le vent en poupe, Labrune s’est donc découvert une vocation pour ce qui ressemble à de la conspiration, réunissant dans son giron quelques amis parisiens. Le club olympien parait constituer à ses yeux un parfait terrain de jeu.

Labrune veut faire du tri sélectif
Si Labrune ne parle pas beaucoup dans les médias, il prépare avec l’actionnaire un charmant programme : « nettoyer » les dirigeants en place avant de faire les poubelles avec l’OM. Décidé à faire tomber Pape Diouf, le président du conseil de surveillance serait d’ailleurs prêt, selon certaines sources, à le « salir » en constituant un dossier à charge en vue de rallier l’opinion des supporters. Première erreur sur laquelle il souhaite surfer : la masse salariale jugée trop importante. Flashback : été 2008, quelques jours avant le terme du mercato, Djibril Cissé est prêté à Sunderland. RLD a effectivement demandé à ce qu’on se débarrasse de son salaire, étant donné qu’il ne joue que des bribes de match. Il saborde par la même occasion le mercato marseillais car il est bien tard pour le remplacer. En cette fin de saison 2008-2009, le reproche est le même. Labrune considérerait que le club a trop de joueur sous contrat. L’OM engrange pourtant d’importants bénéfices et tous les joueurs ont été utilisés. On se souvient que lorsque Louis-Dreyfus lui-même était sur le devant de la scène, les déficits étaient abyssaux. On sait également que l’actionnaire principal se gave en affichant au rabais ses marques sur le maillot du club, ce qui ne facilite évidemment pas le travail de Pape Diouf…

Adepte des défis, Robert Louis-Dreyfus entend rentrer dans le livre des records comme étant le premier président d’un club de football interdit de séjour dans la propre ville de son équipe. Borné, inculte et médisant, tout au moins dans le domaine du football, l’homme sabote sa propre propriété. La raison ? L’argent peut-être, ou alors le plaisir de la surprise, ou encore une passion cachée. Sa popularité est telle à Marseille que personne ne serait étonné d’apprendre un jour que l’homme travaillait en secret avec Labrune pour le compte du Paris-SG !
L’avenir de Pape Diouf reste incertain. RLD semblant se moquer du soutien que les supporters affichent au Sénégalais, l’OM semble prêt à basculer dans le vide.