Bilan de la saison : la politique de Labrune au banc des accusés

Quatrième au terme du championnat de Ligue 1, l’OM n’a pas atteint ses objectifs et ne participera pas à la C1, l’année prochaine. Un nouveau frein dans sa progression.

Vincent Labrune

Les acteurs se sont envolés pour Hawaï, New York ou Miami, le rideau est tiré et le spectacle terminé. Aussi théâtrale et captivante qu’elle fût, la saison phocéenne laisse un arrière-goût d’amertume qui sera long à faire partir. Les raisons invoquées sont multiples (arbitrage défavorable, erreurs d’inattention, quiproquos linguistiques, …) et importent moins que le terrible constat : L’OM va enchaîner un deuxième exercice sans participer à la plus prestigieuse et lucrative des compétitions. Il devra également se justifier de son troisième budget consécutif négatif (le déficit serait supérieur à 30 millions d’euros selon L’Equipe, Ndlr) devant la DNCG. Il s’agit d’un échec retentissant.
Nommé en 2011, Vincent Labrune a disposé d’un environnement calme et de temps pour mettre en place son plan. Pour quelle efficacité ?

Les limites du « projet Dortmund »

On parle d’une stratégie qui connaît quelques soubresauts chez le « modèle ». Le club allemand a présenté un déficit, sur la première partie de cette saison, et a terminé son championnat à la septième place du classement. La preuve s’il en fallait qu’elle n’est pas infaillible. L’OM n’étant pas parvenu à devenir, de près ou de loin, le « Bayern du sud », il fallait néanmoins lui trouver un autre cap. Les Jaune et Noir, qui s’étaient hissés en finale de la Ligue des Champions en 2013, avaient engrangé les millions à coup d’énormes plus-values. Ils disposaient d’une politique bien différente, axée sur la formation, voire la post-formation. Conquis, Vincent Labrune a omis de tenir compte du fait que les Bouches-du-Rhône n’avaient pas plus de points communs avec la Rhénanie-du-Nord-Westphalie, qu’ils n’en avaient avec la Bavière.

Un contexte difficile à appréhender

Miser sur la jeunesse présente effectivement des risques, particulièrement dans un contexte où la démesure et la ferveur décuplent la pression qui repose sur les épaules des joueurs. Effrayés ou victimes de melonites aigues, nombreux sont ceux qui, bien qu’aguerris et expérimentés, se sont cassés les dents sur l’environnement marseillais. En outre, la stratégie adoptée n’est pas bien différente de celle déjà prônée du côté de Lyon, Monaco ou Lille. Comment imaginer que l’OM puisse garder sa compétitivité en venant les concurrencer sur leur propre terrain, alors qu’il compte une bonne dizaine d’années de retard sur eux en matière de formation ? Le club paraît rétrécir à mesure qu’il est imprégné par le projet et c’était prévisible.

Mercatos : l’OM accumule les bides

Vincent Labrune a eu beau se féliciter des arrivées de Matheus Doria, « hyper connu par tous les gens du foot », et d’Abdelaziz Barrada, arraché au très compétitif championnat qatari, elles se sont révélées être deux terribles fiascos. Elles ont aussi coûté très cher au club (au bas mot, 10 millions d’euros, Ndlr). On peut pourtant penser que cette somme aurait pu servir à répondre aux réelles demandes de renforts de Marcelo Bielsa, en particulier au milieu du terrain, voire à prolonger certains cadres olympiens. Par ailleurs, la gestion des Lofteurs a été calamiteuse et a donné une triste image de l’OM. Quelques observateurs se font certainement la réflexion que ces erreurs ont déjà été commises par les devanciers du président.

Des résultats proportionnels à la masse salariale

L’écart entre les grands et les petits clubs s’est considérablement accru, ces dernières saisons. Et cela n’a pas profité à l’institution marseillaise, laquelle semble davantage aspirée par les profondeurs du classement que par les sommets. Il suffit de comparer l’effectif actuel à ceux des ères Pape Diouf ou Jean-Claude Dassier (bien que ces derniers ne soient pas non plus exempts de tout reproche) pour prendre la mesure de l’ampleur de sa régression qualitative et quantitative. Malgré son incroyable popularité, l’OM présente une masse salariale inférieure à celle de l’OL, et c’est assez incompréhensible. Cela ne devrait pas aller en s’arrangeant : le salary cap imposé par Vincent Labrune pour cet été, révélé par Canal+, serait de l’ordre de 100 000 euros mensuels, soit l’équivalent de celui de Saint-Étienne. Simple question, les prolongations d’André Ayew et André-Pierre Gignac auraient-elles posé de gros problèmes il y a cinq ans ?

MLD pas concernée

Le manque d’ambition de l’OM trouve certainement son explication un peu plus haut, du côté de la propriétaire. Car, selon toute vraisemblance, l’objectif de Margarita Louis-Dreyfus semble être de s’assurer que le club ne lui coûtera pas d’argent. Quant au passionné Kyril, il paraît bien trop jeune pour représenter l’avenir immédiat du club. Comme le suggérait Bernard Tapie, il y a quelques jours, ne devrait-elle pas envisager de se séparer de l’institution phocéenne ? Aussi folkloriques que furent les révélations de certains médias au sujet d’acheteurs potentiels, on ne peut pas imaginer qu’un club pourvu d’une telle renommée n’intéresse pas des investisseurs. D’autant plus si la ville envisage la vente de ce Stade Vélodrome qui lui coûte si cher.

Si Vincent Labrune a le mérite de s’attaquer au chantier de la formation et amène quelques idées innovantes, on peut penser que son inexpérience du milieu du football a coûté très cher au club marseillais. Sa stratégie semble en tout cas sérieusement impacter ses résultats et ses ambitions (qui étaient pourtant déjà minces). Sans investissement de la part de l’actionnaire, le modèle mis en place par Pape Diouf n’était-il pas plus viable ? VL a beau nous expliquer que tout rentre dans le planning prévu, le club repart d’un peu plus bas chaque saison. Et, à ce rythme, il sera bientôt difficile de concurrencer l’ASSE pour la Ligue Europa.

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